A propos du primal
pratiqué
avec partenaire
ou individuellement.

 


par Réal Beaulieu, MA,1 MFT2 Thérapeute primal

(traduction Bruno Moncorgé)

[« Formé par le Dr. Janov de 1989 à 1995,
j’ai travaillé pour le Primal Training Center
en tant que thérapeute primal certifié et supervisé de 1993 à 1995. »]

 


". . . Je ne connais personne qui soit « guéri » à ce jour.
Je connais des gens qui sont sur la voie de la guérison.
Cela reste vrai depuis vingt-cinq ans que nous nous connaissons.
Il n’y a rien d’anormal à cela, si on considère que rien que pour rester physiquement en bonne  
santé… il est recommandé de faire de l’exercice trois à cinq fois par semaine. "
-- Réal Beaulieu

 

La thérapie primale se devrait d’être pratiquée en relation avec d’autres. Ce n’est que dans un cadre d’empathie et de relations chaleureuses que nous pouvons guérir de la privation et de l’isolement que beaucoup d’entre nous ont subi au tout début de nos vies. C’est pourquoi je pense que la thérapie primale avec un ou une partenaire est préférable au fait de pratiquer le primal individuellement.

Ce qui ne veut pas dire que pleurer quand on est seul doit être déconseillé. Bien au contraire ! Tous les enfants sont un témoignage du fait que se mettre en colère ou pleurer spontanément en réaction à la douleur est naturel et curatif. C’est l’essence même de la thérapie primale. Je pratique personnellement le primal seul quand j’en sens le besoin.

En d’autres termes, je m’autorise à pleurer lorsque je sens de la tristesse, habituellement le matin. Quand je suis dans une humeur de ce genre, mon rituel est le suivant : Je me prépare une bonne tasse de café, je mets une musique apaisante (j’aime particulièrement André Gagnon), je m’installe confortablement dans mon fauteuil, je lis quelque chose qui m’inspire, je m’accorde deux heures de temps hors de la « pression » quotidienne, je fais attention aux sensations dans mon corps, j’observe ma respiration (est-elle superficielle ou profonde ?) et je laisse mes pensées vagabonder.

Il se peut qu’une pensée, une image ou une sensation s’impose d’elle-même et assez vite la tristesse se métamorphose en larmes, tandis que les pensées, les images ou les sensations se font plus précises, plus spécifiques. Puis « ah ah ! », je ressens l’origine de ma tristesse, et je me sens alors prêt à poursuivre ma journée. Voici toute l’étendue que revêt ma pratique du primal lorsque je suis seul.

Ce contre quoi j’aimerais vous mettre en garde, c’est le fait d’essayer de façon systématique de faire émerger des sentiments par soi-même, seul(e) dans une boîte primale ou ailleurs, sans un contact occasionnel avec un(e) partenaire ou avec un(e) thérapeute, dans l’espoir que cela vous fera « guérir ». Cela peut vous conduire à abréagir*- (causes courantes : trop forcer, sentiments qui ne cheminent pas de l’intérieur vers l’extérieur)-. Le primal avec partenaire est théoriquement une meilleure option parce qu’il va à contre-courant de la tendance à l’isolement qui nous a rendu dysfonctionnels ou névrotiques à l’origine.

Par ailleurs, la thérapie primale peut être très onéreuse si l’on considère que c’est l’affaire de toute une vie. Au passage, je ne connais personne qui soit « guéri » à ce jour. Je connais des gens qui sont sur la voie de la guérison. Cela reste vrai depuis vingt-cinq ans que nous nous connaissons. Il n’y a rien d’anormal à cela, si on considère que rien que pour rester physiquement en bonne santé, c’est à dire sans que sa santé ne se dégrade, il est recommandé de faire de l’exercice trois à cinq fois par semaine.

Bien entendu, beaucoup de choses peuvent mal tourner pendant une séance avec un(e) partenaire. J’en ferai le sujet d’un prochain article. Pour l’instant, j’aimerais simplement encourager à la réflexion sur ce qui peut mal tourner, y compris lorsque vous partagez vos sentiments avec un être humain chaleureux et dans l’empathie.

A cette fin, voici un petit questionnaire que j’ai mis au point pendant ma formation au Centre Primal de Janov.

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1. Pensez-vous pouvoir reconnaître l’une des situations suivantes pendant une séance avec un(e) partenaire ?

a. votre partenaire est en troisième ligne.
b. est en deuxième ligne.
c. est en première ligne.
d. a un bon accès aux trois niveaux de conscience et aux connexions 3-2-1.
e. est bloqué(e) dans un “mélange.”
f. est en abréaction.
g. a des intrusions de première ligne en troisième ligne… en deuxième ligne …

2. Est-ce que ressentir maintes et maintes fois sa souffrance (disons par exemple de se sentir abandonné(e) en tant qu’enfant) est suffisant pour obtenir une résolution ?

3. Quelle est la différence entre sentir sa souffrance et sentir son besoin ?

4. Est-ce que sentir vos sentiments (souffrance et besoin) est suffisant pour changer votre vie ?

 

Que feriez-vous dans les cas suivants?

1.      Votre partenaire vient aux séance et, en règle générale, parle rarement de ce qui se passe dans sa vie ou de ce qui déclenche en elle des sentiments dans son présent.

2.      L’expression de ses sentiments est généralement limité à de la colère.

3.      Votre partenaire n’exprime jamais de colère.

4.      Durant une séance typique, il  pleure un peu, tousse, s’étrangle, cherche sa respiration, pleure un peu, s’arrête, baille, parle un peu, etc. Ne se sent pas mieux après une séance.

5.      Sent depuis des mois combien ses parents le haïssaient. Pleure beaucoup mais ne semble pas aller mieux. Semble de plus en plus dépressif ou anxieux.

6.      Répète depuis un mois ou plus « Je me sens coincé… je n’avance pas… Rien ne marche… à quoi ça sert ?… » Pas de toussotements ni de manifestations physiques.

7.      Ses pleurs ne vous touchent pas. Ils donnent l’impression d’être forcés et geignards. Vous vous ennuyez. Cela fait déjà un moment que vous avez pris conscience de cela.

 

* A propos de l’abréaction :

Celle-ci peut se produire lorsque un client essaie “à tout prix” d’obtenir un sentiment. Ces tentatives pour sentir donnent immanquablement l’impression d’être simulées et non naturelles. Le(la) thérapeute ne se sent pas ému(e) ni touché(e). Au contraire, le client est plutôt une source d’agacement, car le sentiment est essentiellement artificiel et donne l’impression d’une sorte de crise de folie. Cela est susceptible de se produire lorsqu’un client se sent “obligé de produire un résultat”.

Cette pression peut être subtile. Par exemple, l’attente implicite du thérapeute ou du partenaire, la formule de l’isolement initial de trois semaines coûtant des milliers de dollars, l’interruption soudaine de la vie quotidienne combinée à l’attente d’une cure rapide, tout cela peut conduire à abréagir.

J’aimerais également souligner que des abréactions se produisent lorsque des clients s’échappent du contexte de leur réalité présente et essaient à tout prix de faire de la thérapie primale en allant trop vite dans le passé. Cela m'est en partie arrivé au début, lors de mes trois semaines intensives.

 

Vous pouvez écrire à l’auteur à  primal@consultant.com

Réal Beaulieu a également écrit Primal Theory vs Past Lives Theory
Primal Therapy: What It Is and What It Is Not
On The Origins of Death Anxiety
Before The Plunge: Preparing For Primal Therapy

 



[1] Maîtrise de psychologie clinique (Master of Arts in Clinical Psychology)

[2] Thérapeute familial (Marriage and Family Therapy)